Les traitements
psychologiques des hallucinations auditives
En
moyenne, 60% des personnes atteintes de schizophrénie ont des hallucinations auditives
(écart selon les études 25-94%). Dans la population, entre 10% et 39% des personnes
interrogées disent avoir entendu des voix à un moment de leur vie. Souvent
lexpérience hallucinatoire est angoissante. Le contenu des voix est le plus souvent
injurieux. Une étude indique quun quart des personnes atteintes de schizophrénie
ont commis une tentative de suicide en réponse à leurs hallucinations auditives. Le plus
souvent les hallucinations auditives sont traitées avec des neuroleptiques, mais dans 25
à 30% des cas elles y sont réfractaires. Une étude comparative, utilisant la
neuro-imagerie fonctionnelle, montre une augmentation du flux sanguin dans laire de
Broca aux moments où les patients entendent des voix par opposition aux moments où ils
nont pas dhallucination. Il apparaît également que la réaction au langage
extérieur du cortex temporal droit est modifiée lorsque la personne entend
simultanément des voix. Ceci suggère une compétition entre les voix et le langage
extérieur au niveau du cortex auditif.
Les
stratégies utilisées par les patients |
Lexpérience de lhallucination
auditive étant un phénomène subjectif, il est utile de voir quelles sont
dinstinct les techniques utilisées par les patients pour composer ou faire face aux
voix. Cinq études ont été menées dans ce sens auprès dun large échantillon de
patients. Il apparaît que les techniques les plus couramment utilisées sont :
Les techniques de stimulation auditive qui
fait concurrence aux voix comme écouter de la musique ou la radio.
- Les techniques impliquant lactivité vocale comme
parler à dautre personne ou fredonner.
- Les techniques comportementales qui visent la modification
de létat dexcitation physiologique comme se relaxer, dormir ou faire de
lexercice.
- Les techniques cognitives comme ignorer ou bloquer les voix
ou diriger ses pensées sur un autre sujet.
Il ressort de cette étude que les patients
réagissent mieux à leur voix lorsquils utilisent moins de techniques mais avec
plus de rigueur.
En revanche, il existe peu de données sur
ce qui aggrave les voix. Nous possédons également peu dinformation au sujet des
patients qui apprécient leurs voix. De même, nous ne savons pas si les méthodes
utilisées par les personnes non schizophrènes sont différentes de celles décrites
ci-dessus.
Les
traitements psychologiques |
Auto-surveillance
Une première méthode consiste à demander
au patient de surveiller ses hallucinations et de les noter sur une grille en décrivant
leur forme et leur contenu. Si cette intervention semble réduire langoisse
associée ou la durée des périodes hallucinatoires, les bénéfices ne se maintiennent
pas après larrêt de lintervention.
Les traitements
comportementaux
Quelques études de cas rapportent que les
techniques opérantes comme le renforcement ou lextinction ont une certaine
efficacité. Malheureusement, ces techniques sont limitées par le fait quelles
négligent lexpérience phénoménologique qui coïncide avec le symptôme. Les
patients peuvent être conduits à moins parler de leurs hallucinations mais leur
souffrance nen est pas pour autant diminuée. Ces techniques peuvent être utiles
pour apprendre aux patients à discriminer entre les situations dans lesquelles ils
peuvent ou ne peuvent pas parler de leurs symptômes.
Les traitements de
distraction
Plusieurs cliniciens ont utilisé des
méthodes comme lécoute de musique populaire avec un baladeur, le tampon
auriculaire ou des tâches impliquant lactivité vocale. La stimulation auditive
semble être une méthode efficace pour réduire la fréquence des hallucinations
auditives. La nature de la stimulation sonore reste spécifique au patient. Le tampon
auriculaire a été démontré utile. Toutefois, les résultats sont inconsistants en ce
qui concerne loreille qui doit porter le tampon auriculaire, loreille
dominante ou lautre. Il apparaît également que chez certains patients dont les
voix sont accompagnées par une subvocalisation, il est utile de bloquer celle-ci soit en
les faisant fredonner ou lire ou parler à haute voix. Cette méthode semble encore plus
efficace si elle est accompagnée dune autre activité motrice comme trier des
cartes.
Les traitements
cognitifs
Les thérapies cognitives des
hallucinations visent essentiellement à changer le sens que les patients donnent aux
voix. Elles semblent utiles pour certains patients. Il est difficile didentifier les
patients qui ont les meilleures probabilités de répondre au traitement. En effet,
certaines études montrent quune partie importante des patients ont de la peine à
sengager dans ce type de traitement.
Conclusions
Il est difficile détudier les
hallucinations auditives. Tout dabord, parce quil sagit dun
phénomène subjectif qui ne peut pas être mesuré directement par un instrument de
mesure. Le clinicien doit se baser sur ce que dit le patient. Aussi, il existe peu
dinstrument spécialisé pour mesurer les voix. La généralisation des résultats
en dehors du lieu de soins nest pas toujours décrites dans ces études ou les
techniques préconisées ne sont pas toujours praticables dans la vie de tous les jours.
Peu détude ont mesuré simultanément le fonctionnement social des patients. Ceci
serait particulièrement utile pour savoir comment les hallucinations interfèrent avec
les activités de la vie quotidienne. Finalement, il est difficile de distinguer les
effets des traitements psychologiques testés des effets des traitements pharmacologiques
prescrits.
Ce document est tiré de :
Sukhwinder S. Shergill, Robin M. Murray, Philip K.
McGuire : Auditory hallucinations : a review of psychological treatments.
Schizophrenia Research, 1998, 32 : 197-150.
Patrick W. Corrigan, Psy. D., Daniel M. Storzbach,
M.A. : Behavioral interventions for alleviating psychotic symptoms. Hospital and
Community Psychiatry, 1993, Vol. 44, No 4, 341-347.
A venir dès la semaine du 28
septembre '98 : un questionnaire d'évaluation des croyances du patient au sujet de ses
voix, ainsi que l'échelle de cotation associée.
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